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Préjudice d’anxiété : l’action en reconnaissance et indemnisation du préjudice se prescrit par deux ans

Par un arrêt du 12 novembre 2020 (Cass. Soc., 12 novembre 2020, n°19-18490, FS-P+B+I), la Cour de cassation a précisé que l’action par laquelle un salarié ayant travaillé dans un établissement classé au titre de l’ACAATA demande réparation de son préjudice d’anxiété se prescrit par deux ans à compter de la date de publication de l’arrêté de classement de l’établissement.

Avec cet arrêt, la Cour de cassation apporte une nouvelle pierre à la construction jurisprudentielle du régime du préjudice d’anxiété et une contribution attendue sur la question spécifique du délai de prescription de l’action du salarié à ce titre.

  1. Rappel de l’évolution jurisprudentielle sur le préjudice d’anxiété indemnisable

Consacrée par la Chambre sociale de la Cour de cassation en 2010, la notion de préjudice d’anxiété a considérablement évolué ces dix dernières années.

C’est par un arrêt du 10 mai 2010 (Cass. Soc., 10 mai 2010, n°09-42241 à 09-42257) que la Chambre sociale de la Cour de cassation a, pour la première fois, reconnu un « préjudice spécifique d’anxiété » aux salariés ayant travaillé dans un établissement mentionné à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998. En vertu de ce texte, les salariés ayant travaillé dans un établissement listé par arrêté ministériel ayant eu une activité de fabrication de matériaux contenant de l’amiante, de flocage ou de calorifugeage à l’amiante, ou de construction et de réparation navale, peuvent bénéficier d’un départ anticipé à la retraite, leur ouvrant droit à une Allocation de Cessation Anticipée d’Activité des Travailleurs de l’Amiante (ACAATA). Avec cet arrêt, la Cour de cassation consacrait donc la possibilité pour les salariés de ces établissements qui se trouvent « par le fait de l’employeur dans une situation d’inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d’une maladie liée à l’amiante » de prétendre à l’indemnisation de leur préjudice d’anxiété.

La Cour de cassation a progressivement étendu et précisé le régime de l’indemnisation du préjudice d’anxiété.

Par un revirement de 2019, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation a redéfini le préjudice d’anxiété.

En effet, le 5 avril 2019 (Cass. Ass. Plen., 5 avril 2019, n°18-17442), la Cour de cassation a reconnu qu’un salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante générant un risque élevé de développer une pathologie grave peut être admis à agir contre son employeur, sur le fondement des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de ce dernier, quand bien même il n’aurait pas travaillé dans un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998.

Mais la Cour de cassation n’en est pas restée là et le domaine du préjudice d’anxiété a encore été étendu.

Par un arrêt du 11 septembre 2019, la Cour de cassation l’a encore élargi en considérant que tout salarié « qui justifie d’une exposition à une substance nocive ou toxique générant un risque élevé de développer une pathologie grave et d’un préjudice d’anxiété personnellement subi résultant d’une telle exposition, peut agir contre son employeur pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité ». (Cass. Soc., 11 septembre 2019, n°17-24879 à 17-25623)

Désormais non exclusivement réservé au régime dérogatoire accordé aux salariés d’établissements ACAATA, la Cour de cassation a donc introduit en 2019 le préjudice d’anxiété sur le terrain du droit commun de la responsabilité de l’employeur.

Sur ce nouveau terrain, pour prétendre à la réparation de son préjudice d’anxiété, il revient au salarié exposé à une substance nocive (amiante ou autre) d’établir une violation par l’employeur de son obligation de sécurité et l’existence d’un préjudice certain personnellement subi en conséquence de cette violation.

L’employeur pourra quant à lui s’exonérer de sa responsabilité s’il établit avoir pris toutes les mesures nécessaires d’information et de protection, tant individuelles que collectives, de la sécurité et de la santé physique et mentale des travailleurs.

  1. Les principes dégagés en matière de prescription de l’action en réparation du préjudice d’anxiété

S’agissant du régime de prescription applicable à l’action en reconnaissance du préjudice d’anxiété, la Cour de cassation avait initialement retenu une prescription de cinq ans, par référence au principe de prescription extinctive de droit commun fixé à l’article 2224 du Code civil, pour la réparation du préjudice d’anxiété des salariés éligibles à l’ACAATA.

Or, la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 a profondément réformé le régime de la prescription dans les relations de droit du travail, en réduisant à deux ans la prescription des actions portant sur l’exécution et la rupture du contrat de travail, par dérogation à la prescription quinquennale de droit commun.

Désormais, en vertu de l’article L. 1471-1 du Code du travail, toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

L’attraction du préjudice d’anxiété sur le terrain de droit commun du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité devait donc emporter des conséquences quant au régime de prescription applicable.

Par un arrêt du 8 juillet 2020, la Cour de cassation a donc procédé à un revirement s’agissant de la durée du délai de prescription applicable à l’action en réparation du préjudice d’anxiété engagée par le salarié à l’encontre de son employeur.

La Cour de cassation a fixé le délai de prescription de cette action à deux ans, ce délai commençant à courir à la date à laquelle le salarié a eu connaissance du risque élevé de développer une pathologie grave résultant de son exposition à l’amiante ou à un agent nocif, et ce point de départ ne pouvant être antérieur à la date à laquelle cette exposition a pris fin. (Cass. Soc., 8 juillet 2020, n°18-26585 à 18-26655).

Il est donc à noter que le délai de prescription ne court pas tant que le salarié est exposé au risque, ce qui a pour effet d’en retarder le point de départ.

  1. L’alignement de la prescription sur la prescription biennale pour les salariés ACAATA

Par son récent arrêt du 12 novembre 2020 (Cass. Soc., 12 novembre 2020, n°19-18490) rendu cette fois-ci dans le cadre de l’action d’un salarié exposé à l’amiante dans un établissement relevant du dispositif ACAATA, la Chambre sociale est venue consolider le régime de la prescription applicable en matière de préjudice d’anxiété.

En l’espèce, l’affaire concernait un salarié exposé aux fibres d’amiante dans l’exercice de son activité professionnelle qui avait saisi la justice d’une demande de réparation de son préjudice d’anxiété. Ayant constaté que l’arrêté ministériel du 2 octobre 2013, qui avait inscrit l’établissement au sein duquel il avait travaillé de 1957 à 1987 sur la liste de ceux permettant la mise en œuvre du régime de l’ACAATA pour la période 1951-2001, avait été publié le 12 octobre 2013, les juges du fond en avaient déduit que le délai de prescription de l’action du salarié, d’une durée de deux ans, avait expiré le 12 octobre 2015, de sorte que la demande introduite postérieurement à cette date, le 3 novembre 2016, était irrecevable comme prescrite. Le salarié se prévalait quant à lui du délai de prescription de droit commun de cinq ans.

Considérant que « l’action par laquelle un salarié, ayant travaillé dans un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l’amiante ou des matériaux contenant de l’amiante, demande réparation du préjudice d’anxiété, au motif qu’il se trouve, du fait de l’employeur, dans un état d’inquiétude permanente généré par le risque de déclaration à tout moment d’une maladie liée à l’amiante, se rattache à l’exécution du contrat de travail », la Cour de cassation en déduit qu’il en résulte que cette action était soumise à la prescription de deux ans prévue à l’article L. 1471-1 du Code du travail.

Ce faisant, la juridiction suprême aligne donc la durée du délai de prescription de l’action du salarié éligible à l’ACAATA sur celle de l’action du salarié non éligible à l’ACAATA.

  1. La fixation du point de départ de la prescription au jour de la publication de l’arrêté de classement ACAATA

Comme pour toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail, la prescription biennale commence à courir à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

Toutefois, et la précision est importante, il ressort de l’arrêt du 12 novembre 2020 que, s’agissant d’un établissement inscrit sur la liste des établissements permettant la mise en œuvre du régime de l’ACAATA, la prescription biennale court à compter du jour de la publication de l’arrêté de classement du site.

Cette position avait déjà été dégagée par la Cour de cassation quelques mois plus tôt. En effet, dans un arrêt du 29 janvier 2020 (Cass. Soc., 29 janvier 2020, n°18-15388), elle s’était encore prononcée en faveur d’une prescription quinquennale (« les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits permettant de l’exercer ») mais avait précisé que le salarié bénéficiaire de l’ACAATA avait connaissance du risque à l’origine de son anxiété à compter de l’arrêté ministériel ayant inscrit l’établissement employeur sur la liste de ceux ouvrant droit à l’ACAATA.

Avec l’arrêt du 12 novembre 2020, si la durée de la prescription évolue pour passer à deux ans, son point de départ demeure bien le jour de la publication de l’arrêté.

Dès lors, en l’espèce, ayant constaté que l’arrêté ministériel qui avait inscrit l’établissement sur la liste des établissements permettant la mise en œuvre du régime légal de l’ACAATA avait été publié le 12 octobre 2013, c’est donc à juste titre que la Cour d’appel en avait déduit que le délai de prescription de l’action du salarié avait expiré le 12 octobre 2015 de sorte que la demande introduite postérieurement à cette date, était prescrite.

Désormais, il est confirmé que le délai de prescription de deux ans vaut donc pour tous les salariés demandant réparation du préjudice d’anxiété.

Mais une différence demeure quant au point de départ de ce délai :

  • pour les salariés ayant travaillé dans un établissement classé au titre de l’ACAATA, c’est la date de publication de l’arrêté de classement de l’établissement ;
  • pour les salariés exposés à l’amiante dans un établissement non classé ACAATA ou exposés à une substance toxique autre que l’amiante, c’est la date à laquelle le salarié a eu connaissance d’un risque élevé de développer une pathologie grave résultant de l’exposition, ce point de départ ne pouvant être antérieur à la date à laquelle cette exposition a pris fin.

Dans tous les cas, une telle prescription, courte, constituera un argument de défense non négligeable pour les employeurs puisqu’elle restreint considérablement la recevabilité de l’action des demandeurs sur ce fondement.

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