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LEXIS NEXIS – Raison d’être et fiscalité

Benoit Dambre, avocat associé, revient sur la notion de « raison d’être » en fiscalité dans la revue Actes Pratiques et Ingénierie sociétaire de Lexis Nexis.

La loi PACTE est muette sur ses incidences fiscales de l’obligation pour les entreprises de prendre « en considération les enjeux sociaux et environne- mentaux » (C. civ., art. 1833, al. 2) et de l’introduction de la « raison d’être » et la qualité de société « à mission » et ce n’est en réalité guère surprenant. En premier lieu, ce « silence » s’explique par le fait que la prise en considé- ration des enjeux environnementaux et sociaux impacte déjà des pans entiers de notre droit fiscal, la « politique fiscale » en France traduisant des objectifs sociétaux autres que le simple financement des fonctions régaliennes de l’État. À titre d’exemple, la fiscalité dissuasive des véhicules de sociétés, les taxes environnementales et les crédits d’impôts en vue d’une transition éner- gétique sont légion et visent à modifier les comportements des entreprises et des particuliers.

En second lieu, la « raison d’être » et la qualité de « société à mission » sont des notions sans lien direct, voire déconnectées, avec les principes généraux de déductibilité des charges en fiscalité, où prime la recherche de « l’intérêt » de l’entreprise pour déterminer si, oui ou non, une charge peut être admise en déduction des résultats imposables. On en revient ainsi à la notion « d’acte anormal de gestion », par lequel une entreprise décide de s’appau- vrir à des fins étrangères à son « intérêt » 59. Certes, on peut espérer, raison- nablement, que l’administration fiscale comme le juge de l’impôt prendront désormais en considération, afin d’apprécier cette notion fiscale « d’intérêt », les avantages directs et indirects (par exemple, réputationnels) recherchés par les entreprises concernées, dans le cadre de la mise en œuvre de leur raison d’être ou de leur mission, afin d’apprécier la « normalité » des dépenses engagées.

Enfin, on peut s’étonner que le législateur n’ait pas entendu aller plus loin dans les outils incitatifs mis à disposition des entreprises, s’agissant notam- ment du mécénat. Là encore, la loi PACTE est silencieuse et ne prend pas en compte le choix des entreprises de se doter d’une raison d’être ou d’une mission pouvant les conduire à engager des actions de mécénat plus ambi- tieuses. Le régime du mécénat d’entreprise, déjà très encadré, a même été durci par la loi de finances pour 2020 60 afin de réduire la « dépense fiscale » 61. On peut également regretter que l’instauration du fonds de péren- nité, par l’article 177 de la même loi PACTE, dont le succès risque d’être entravé par la réserve successorale 62 ne soit pas assorti d’un régime fiscal plus avantageux favorisant la création et la pérennité de ces structures d’un genre nouveau.

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